Votre article « grandir sans père » m’a fait réagir et j’ai décidé de vous apporter mon témoignage. J’ai grandi dans une famille brisée avec mes deux frères. Mon père avait quitté le foyer quelques mois après la naissance de mon petit frère, et ma mère s’est retrouvée à élever complètement seule trois jeunes enfants dans un petit appartement. Elle a beaucoup travaillé cumulant deux ou trois emplois à la fois pour payer les factures et mettre de la nourriture sur notre table. Nous étions pauvres, nous manquions de tout (sauf d’amour et de nourriture) mais je n’étais pas malheureuse de la situation. Parce que nous étions enfin libres sans lui.
La plupart des gens affirment que le pire jour de leur vie était le jour où leur père est parti. Pas moi.  Ce fut le jour où ma famille a commencé à vivre.
Mon père était violent, physiquement et mentalement.  Souvent à table il explosait de colère, hurlant et menaçant moi ou un de mes frères si nous avions le malheur de faire du bruit en mastiquant ou de « mal nous tenir à table » . Quand il vivait avec nous, notre vie a été un enfer sur terre. Il criait, frappait, nous faisait constamment des reproches, nous privait de tout. Nous étions trop laids pour lui appartenir, trop bêtes pour pouvoir donner notre avis  sur un quelconque sujet. Parfois, souvent même, je l’ai cru. Une fois ou il était en colère il a pris une paire de ciseaux et m’a coupé les cheveux n’importe comment. Le pire était que mon père était un professeur respecté. . Personne ne se doutait de notre calvaire.
Un jour j’ai dit à ma mère: « je ne comprend pas que tu ne divorce pas ». Elle a pleuré. Et elle l’a fait !
Tout ce que ma mère a fait, elle l’a fait pour nous et pour notre sécurité. Je ne suis pas sûre de savoir comment elle a trouvé la force de le quitter, mais nous l’avons fait. Nous avons vécu alors plus sereinement, malgré les cicatrices émotionnelles qu’il nous a laissées.
Mon frère aîné est d’un père différent. J’ai beau l’aimer et aimer ma famille plus que tout, je me suis toujours sentie différente, légèrement en retrait. Et c’est à cause de lui. Je suis à moitié lui. Je suis la chair de sa chair et j’ai encore des souvenirs de lui (contrairement à mon petit frère). Et on m’a toujours dit que je lui ressemblait physiquement. Je me demande si ma famille le voit quand ils me regardent.
Je l’ai vu mon père trois fois depuis que ma mère l’a quitté et ça a été trois fois de trop.
Ce n’est pas quelqu’un que je veux ou dont j’ai besoin dans ma vie. Ma vie est devenue meilleure, plus heureuse et paisible le jour où il a marché loin de moi. Je compte comme la première de mes nombreuses bénédictions. Il y en a eu d’autres depuis. J’ai aujourd’hui un petit ami et je suis étudiante en 4ème année de médecine. Je ne peux seulement m’imaginer ou j’en serai dans ma vie aujourd’hui s’il joué un rôle actif dans mon éducation.
Ma mère en le quittant a rendu ma vie meilleure.  Ma mère a joué le rôle des deux parents, et c’est grâce à elle seule, je suis qui je suis aujourd’hui. Elle m’a appris à être un être une jeune-femme heureuse et épanouie. Je ne lui dirais jamais assez merci.